HdA 1res – Cours du 21 mai : Interview de Désirée Conti (Vissi d’arte)

Questions générales

  • En quoi consiste votre travail ?

Je dirige un centre culturel ; c’est un centre qui s’occupe de culture : on y trouve un atelier de production créative, des cours de langues… C’est un centre culturel privé et de petite taille, qui existe depuis 9 ans. Aujourd’hui, on y a toute une équipe de profs, une chargée de communication ; je suis directrice et je supervise l’ensemble tout en continuant à donner des cours. Je suis donc prof d’italien, de français, médiatrice culturelle et organisatrice d’événements.

  •  Travaillez-vous seule ou en équipe ?

Je réalise beaucoup de travail en équipe. Seule, je décide du planning mais ensuite, pour la réalisation, je travaille en équipe (ex : cours d’allemand). Aujourd’hui, j’accepte de ne pas toujours tout faire, je sais déléguer. Mais quand je dis seule, je pense « deux » car mon compagnon gère le centre avec moi.

  • Comment avez-vous entendu parler de ce travail ?

Quand on étudie, on ne sait pas trop ce qu’on va devenir professionnellement. Quand on fait des lettres, de la philosophie de la communication, de la médiation interculturelle, il faut être créatif car on n’a pas de débouché clair et direct. Je voulais trouver un emploi qui réunisse toutes mes envies. Je savais jute que je voulais travailler dans la culture et organiser des événements. Quand je suis arrivée en Uruguay, je ne connaissais rien, j’ai trouvé les réponses en cheminant.

  • Comment vous êtes-vous formée à ce métier ?

J’ai d’abord été professeure de langue puis j’ai étudié la communication sur le plan philosophique. J’aurais pu être mieux formée, par exemple pour la rédaction d’un projet. Je me suis donc beaucoup formée sur le terrain et maintenant je peux déléguer certaines tâches (comptabilité…). .

  • Faut-il une qualité, un talent particulier pour exercer ce métier ?

Il faut avoir de l’empathie, pouvoir comprendre les autres et se mettre à leur place sans juger, savoir être avec les gens. Il faut être très organisé et savoir gérer plusieurs choses en même temps. Il faut aussi savoir trouver les bons collaborateurs, en qui on peut avoir confiance.

  • Avez-vous une anecdote à nous raconter ?

L’année dernière, on était en plein distanciel, j’étais à la maison en train de donner un cours ; il y avait d’autres profs qui faisaient pareil. Mon compagnon le faisait aussi au centre culturel ; une collaboratrice, Victoria, le faisait aussi dans le nouveau local. Un monsieur vient pour installer l’interphone, et touche une canalisation : le centre culturel est inondé, on ne savait pas où était la vanne d’arrêt d’eau et Gabriel a continué à donner cours avec les pieds dans l’eau.

Questions sur les métiers de la culture selon les pays

  • Comment les différents pays où vous avez habités soutiennent-ils la culture ?

En pratique (finances), en Uruguay il y a du soutien depuis une quinzaine d’années mais ce n’est pas suffisant. Les gens du théâtre, les musiciens ne sont pas soutenus. En France, l’intermittence du spectacle est un système merveilleux : cela n’existe ni en Uruguay ni en Italie. Il faudrait faire plus pour la culture et pour l’éducation car l’idée prédomine que la culture n’est pas l’urgence. Mais les Uruguayens sont très curieux, ont envie d’apprendre.  Ils se désignent comme le « petit pays », écrasé entre le Brésil et l’Argentine : ils sont donc tournés vers l’ailleurs. En Uruguay, il y a un amour pour le ballet : les spectacles sont toujours complets. En Italie, il n’y pas d’intermittence mais il y a davantage d’aides sociales pour tout le monde.

  • Qui sont les gens qui font vivre la culture dans ces différents pays ?

En Uruguay, l’attention à la culture vient de tous les côtés ; certains événements attirent des catégories particulières. Concernant la culture italienne, il y a beaucoup d’intérêt car il y a beaucoup de gens d’origine italienne en Uruguay (il y a même des associations italiennes par région en Uruguay : Rome, Naples…). Le théâtre est plutôt pour les gens plus âgés, le cinéma attire plus les jeunes… Il y a aussi un lien fort avec l’Espagne.

  • Comment faites-vous actuellement, pour donner des cours artistiques et organiser des spectacles ?

Il faut beaucoup de créativité : on donne des cours à distance. Pour le côté musique, c’est plus compliqué. L’activité qui a le plus souffert, c’est le chant et la chorale, comme toutes les activités collectives (ensemble musical). Pour s’en sortir, il ne faut pas trop penser à ce qu’on avait et se concentrer sur ce que l’on a. Par exemple, on peut donner des cours dans le centre du pays en visio.   

Questions sur l’Uruguay

  • Quel est votre artiste uruguayen préféré ?

Le Rio de la Plata est le fleuve qui sépare l’Uruguay de l’Argentine et une zone où la culture et la musique est similaire en Uruguay et en Argentine (zamba, tango, milonga) : on y trouve un mélange de mélancolie et de virilité, que j’aime beaucoup. Alfredo Zitarrosa est un grand artiste urugayen de milonga.  

  • Quel film regarder pour découvrir l’Uruguay ?

Le cinéma n’est pas l’art le plus prisé en Uruguay ; la musique y est très présente. Un film, La noche de los doce anos, parle néanmoins de la dictature uruguayenne. Hier, 20 mai, était le jour qui rappelle la dictature, qui a commencé dans les années 70 (1973) et a pris fin dans les années 80 (1985) : ce jour-là est organisée une marche du silence pour garder le souvenir des disparus (desaparacidos).  

Un film argentin, Le secret de ses yeux, a gagné l’Oscar du meilleur film étranger et retrace bien l’histoire de cette dictature.

  • Que reste-t-il de la culture indienne dans l’Uruguay d’aujourd’hui ?

L’histoire uruguayenne est aussi douloureuse sur le plan de la colonisation : ce n’est pas là où il y a une identité forte sur le plan des cultures indigènes. C’est plus développé en Bolivie ou au Pérou. C’est le pays le plus européen de l’Amérique du Sud.

Questions interdites

  1. Combien gagnez-vous ?

Pas suffisamment pour rémunérer le nombre d’heures travaillées ! Mais j’aime ce que je fais et je vis bien, alors que l’Uruguay est un pays cher.

  • Quel serait votre métier idéal ?

Regardeuse pour séries de télé (polar comme Il commissario Montalbano, Rocco Schavone ; dans les hôpitaux) ! Mais j’aime beaucoup mon métier ; j’aimerais avoir davantage de temps libre.

  • D’où vient « Vissi d’arte » ?

De Tosca, l’opéra de Puccini : c’est un aria de soprano qui veut dire « J’ai vécu d’art ».